De la modélisation à la gestion de crise
J'ai déja rédigé ici deux articles traitant du pilote expérimental de prévision de crues monté en partenariat avec Géomod autour de la solution ICM Live :
- Modélisation temps réel : l'article décrit succinctement le fonctionnement d'un sytème de modélisation automatisé
- Simulations en cascade : cet article présente le principe de simulations déclenchées à la détection de certains événements dans les flux de données ou dans une simulation globale simplifiée
Nous allons aborder ici dans un ensemble plus large la configuration complète de l'outil et les usages opérationnels qui peuvent en être faits.
Note : la prévision de crue et la gestion de crise sont de la responsabilité des pouvoirs publics, cet article vise uniquement à présenter des outils et solutions techniques permettant de faciliter les processus de la prévision et de l'alerte.
le systeme de modélisation
Nous avons vu dans le premier article l'enchainement des actions menées par le système :
- Différents flux de données (mesures de la pluviométrie au sol, niveaux et débits issus des stations DREAL, prévisions météorologiques AROME de Météo France, etc...) sont collectés automatiquement par le système et mis en forme pour être exploité en entrée des modèles hydrologiques et hydrauliques
- Des simulations sont lancées automatiquement à un intervalle défini en fonction des attentes opérationnelles, sur une plage de temps avant et après t0 cohérentes avec :
- la disponibilité des données de prévision météorologiques (par exemple les données AROME Météo France permettent une prévision à 42 h de leur origine)
- la dynamique des événements, dans l'optique de bien capturer l'ensemble d'un événement type (de la génèse à la redescente de la crue)
- Les resultats bruts de modélisation sont post-traités automatiquement pour produire des éléments exploitables du point de vue opérationnel.
Flux de données issu de capteur pluviométrique
La production d'une prévision fiable
L‘objectif des previsionnistes et des modélisateurs est bien entendu de reduire autant que possible les incertitudes qui interviennent à chaque niveau de la chaîne de traitement :
- incertitudes sur les prévisions météo,
- incertitudes sur les conditions hydrologiques antecedentes,
- fiabilité des réponses hydrologiques et hydrauliques simulées par le modèle
- événéments imprévisibles venant perturber le fonctionnement connu du secteur surveillé (stationnarité d'une cellule orageuse, rupture d'un ouvrage de protection, etc...).
Dans cette optique, plutôt que proposer une prévision unique, on produira un ensemble de scénarios, donnant une tendance de prévision, qui sera affinée à chaque nouvelle donnée acquise (lorsque l'événément pluvieux atteint par exemple le secteur surveillé, les mesures remplacent progressivement la prévision météorologique comme source d'apports, les simulations sont relancées et enrichies avec cette nouvelle donnée plus réaliste).
de la modélisation à la gestion de crise
Les résultats bruts de la modélisation (niveaux, vitesses, débits) ne sont pas les sorties les plus adaptées pour une gestion de crise efficace.
Le système temps réel est ainsi configuré pour assurer un post traitement automatique, et produire des éléments plus opérationnels et ancrés dans la réalité :
Des alertes sont définies au dépassement de certaines valeurs de niveaux et/ou de débits en certains points clefs du réseau surveillé par le système, on reprend notamment les différents niveaux de vigilance aux échelles limnimétriques utilisées couramment dans les Plans Communaux de Sauvegarde, et que les élus connaissent bien.
Seuils d'alerte fixés sur la prévision météorologique : les triangles indiquent le dépassement d'une certaine intensité
- l'atteinte par l'inondation d'enjeux spécifiques ou la mise en charge d'ouvrages de protection par exemple
Ces alertes sont ensuite retranscrites sous la forme de tableaux synthétiques ou affichés sur l'interface cartographique pour une interprétation rapide. On voit ici par exemple une vue synthétique du bassin versant avec les niveaux d'alerte aux 3 stations de référence des PCS. Deux stations sont en vigilance orange, une est en vigilance jaune durant la prévision. Le niveau d'alerte maximal du secteur surveillé est affiché sur le polygone à gauche.
La seconde vue correspond à un focus local. Elle affiche la zone inondée calculée automatiquement par croisement avec un modèle numérique de terrain et apporte un détail supplémentaire sur les niveaux d'alerte, en représentant les secteurs d'intérêt repris dans les PCS et leurs niveaux de vigilance respectifs dans la prévision.
Le partage de l'information opérationnelle
L'information produite n'est exploitée que si elle peut être partagée facilement par les acteurs en charge de la gestion de crise.
Plusieurs options sont alors possibles :
- l'envoi automatique d'alertes au dépassement de seuils définis, par email ou par SMS
- le transfert automatique de sorties du système via un ftp. Le système produira automatiquement les hydrogrammes et limnigrammes projetés, de même que les vues cartographiques et les couches SIG d'emprises inondées prévues.
- l'intégration de ces sorties (emprises inondées, enjeux touchés, hydrogrammes et limnigrammes projetés) directement au sein d'une plateforme webmapping ouverte aux acteurs de la gestion de crise, qui leur permettra de visualiser les emprises projetées, d'afficher parallèle des scénarios d'inondations connues, d'ajouter les actions réalisées sur le terrain, et de partager ces éléments via la plateforme directement ou des extractions PDF.