2D or not 2D ?

2D or not 2D pour les modèles en hydraulique fluviale ?

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Telle est la question qui peut agiter les modélisateurs au moment de débuter leurs modèles de cours d'eau.

Faut il se baser sur des méthodes 1D éprouvées, séculaires, quitte à faire quelques cheveux blancs supplémentaires au moment de stabiliser ce satané modèle, ou faut il passer directement à un modèle 2D complet, avec le risque de voir les temps de calcul s'allonger, et dans ce cas comment faire avec ce fichu lidar qui ne traverse pas (dans la plupart des cas...) la surface de l'eau?

On essaie de vous donner quelques éléments de réponse dans la suite de l'article.

 

 

Le 1D (en lit mineur) ca fonctionne, on a toujours fait comme ça, et de toute manière mes données sont des profils en travers

C'est la voix de la raison, on a toujours fait comme ça, et pourquoi on changerait puisque ça marche, et qu'on a toujours fait comme ça.

crédits : asterix mission cléopatre, 2002

Certes, mais :

  • les modèles 1D (différences finies) peuvent être parfois complexes à stabiliser, surtout lorsqu'ils couvrent d'importants linéaires, qu'ils comportent de nombreux ouvrages et qu'il existe des zones où peuvent se former des assecs, les modèles 1D traditionnels appréciant peu les faibles niveaux d'eau. A noter sur ce point la possilité offerte dans les dernieres version d'HEC RAS de basculer en approche volume finis sur le modèle 1D, pour s'affranchir de ces problématiques.
  • l'approche 2D étant devenu la norme pour représenter les espaces inondables, il est donc nécessaire d'élaborer des modèles couplés 1D/2D. Ces approches peuvent s'avérer très chronophages sur d'importants linéaires, puisqu'il est nécessaire de construire, de manière plus ou moins automatisable, les connexions latérales entre le lit du cours d'eau 1D et les zones inondables 2D.
  • enfin, cette approche couplée 1D/2D peut parfois conduire à des représentations inexacte de ce qui se produit à l'interface cours d'eau/lit majeur lors de débordements : l'approche 1D cours d'eau part de l'hypothèse que les écoulements dans le cours sont sont perpendiculaires aux profils en travers. Au droit de la connexion 1D/2D, les déversements se produisent perpendiculairement à cette interface de connexion.

Enfin, dans la zone 2D, les écoulements ne sont pas contraints du point de vue des directions qu'ils peuvent prendre. Dans le cas de secteurs très débordants, les contraintes liées au 1D/2D, dans la zone de couplage, vont contraindre les écoulements à suivre des directions qui peuvent s'avérer peu réalistes en réalité.

comp 1D2D

Oui, mais le 2D, pas trop compliqué ?

 Les problématiques suivantes peuvent se poser lors de la bascule vers une modélisation en approche 2D complet :

  • difficulté n°1 - la topo : sauf exception (LIDARS bathymétriques), les données MNT, même récentes, ne représentent pas le fond du lit des cours d'eau, puisque les impulsions ne traversent généralement pas la surface de l'eau.

lidar

Il va donc falloir travailler notre MNT afin que celui représente correctement à la fois le lit majeur et le fond du lit, pour une prise en compte précise de la capacité du cours d'eau. Pour cela, on pourra se baser sur des profils en travers, savamment placés pour bien représenter les variations de gabarit du cours d'eau, les ruptures de pente etc... De nombreux outils existent maintenant pour recréer un modèle numérique bathymétrique représentatif des profils et suivant le tracé du cours d'eau (HEC RAS et TUFLOW ont chacun leurs propres outils pour le faire à partir de profils en travers issus de polylignes 3D par exemple).

interpol

  • Difficulté 2 - la dimension des cours d'eau : plus le cours d'eau sera étroit, plus il pourra être délicat de bien représenter son gabarit via une approche 2D.

Plus le cours d'eau sera petit plus les cellules 2D devront être de taille réduite, avec une incidence directe sur les temps de calcul, via le critère de Courant, déja évoqué ici. 

Sur ce point, les logiciels permettant d'exploiter une approche dite "infra mailles" ou Sub Grid Sampling (SGS), auront un avantage : les mailles étant en capacité de prendre en compte des détails de la topographie dont les dimensions sont inférieures a la largeur des cellules, plus besoin de trop réduire ces mailles pour représenter précisément des éléments de petite dimension comme des cours d'eau étroits ou même des fossés.

Cette approche infra-maille, gérée notamment par HEC RAS et TUFLOW, permet même de discrétiser les rugosités. L'article suivant décrit comment fonctionne cette méthode (illustration tirée du wiki TUFLOW).

799px Quadtree SGS Image 4mb

  • Difficulté 3 - les ouvrages : la plupart des modèles 1D proposent une bibliothèque assez complète d'ouvrages permettant de représenter tout type de configuration rencontrée sur les cours d'eau (buses, ponts complexes, vannages, clapets, etc...).

Les modèles 2D ont désormais les mêmes capacités, avec parfois même la possibilité d'aller davantage dans le détail, sur certaines configurations un peu spécifiques. TUFLOW (cf capture ci dessous, tirée du wiki) permet notament une prise en compte très fine des obstructions possibles sur un pont, avec une approche par couches, permettant de représenter les obstructions liées à la maçonnerie, les parapets, etc...

Sur certains cours d'eau suffisament larges, il peut également y avoir un intérêt à privlégier l'approche 2D, permettant de différencier le fonctionnement sur toute la largeur de l'ouvrage, là où l'approche 1D ne peut pas différencier ce qu'il se passe dans le chenal, ou sur les rives droite ou gauche du cours d'eau.

HEC RAS se positionne également bien sur les possibilités d'intégration d'ouvrages au sein du 2D, avec des possibilités assez complètes. Un petit bémol cependant dans les configurations où l'on peut rencontrer de fortes vitesses, les pertes de charges semblant surestimées de manière importante en approche des ouvrages.

bridge  tuflow bridge 
  • Difficulté 4 - les temps de calcul : principal point noir des modèles 2D, les temps de calculs qui sont , comparativement au 1D, beaucoup plus importants, surtout sur des modèles portant sur des linéaires importants.

C'est particulièrement marqué sur HEC RAS, pour qui, malgré une parallélisation sur processeur (CPU) les temps de calculs se chiffrent rapidement en jours dès lors qu'on fait tourner des modèles de plusieurs centaines de milliers de mailles.

Si l'on compare cependant le coût d'un jour/ingénieur(e) vis a vis du coût du calcul (temps machine), le gain apporté par la bascule vers une modélisation 2D, généralement moins chronophage, ne serait-ce que sur les temps gagnés sur la stabilisation de modèle, est rapidement très intéressant d'un point de vue économique.

Si en revanche les délais sont très contraints, le temps de calcul est un facteur à prendre en compte, surtout lorsqu'il s'agit de faire tourner plusieurs itérations pour chaque simulation, en phase de calage des modèles notamment.

Sur ce point, les différentes optimisations (sur le maillage, avec l'approche SGS, et matérielles avec la parallélisation sur carte graphique GPU) donnent l'avantage à des solutions comme TUFLOW, puisque les temps de calculs sont généralement réduits à minima d'un facteur de 10 voir plus, permettant de multiplier les itérations, et d'améliorer ainsi la qualité des modèles, tout en réduisant les délais de production.

 GeForce RTX4090 Back ( credit NVIDIA)avantage au calcul GPU

Quelques références récentes sur lesquelles nous avons mis en oeuvre ces approches, pour montrer que nous pratiquons ce que nous prêchons :

  • Modélisation de la Semois (Belgique) : environ 40 km de modélisation full 2D
  • Modélisation du Suran (Ain) : environ 75 km de cours d'eau modélisés en full 2D
  • Modélisation d'un cours d'eau du sud ouest de la France : environ 40 km de cours d'eau en full 2D

Et d'autres références à venir. 


Nous proposons des formations pour la mise en oeuvre des approches évoquées dans cet article, n'hésitez pas à nous contacter pour plus d'infos.

Surface Libre est distributeur de la solution de modélisation TUFLOW, plus d'infos sur l'outil par ici.

 

 

 

 

 

 

HECRAS, Modélisation, Tuflow